Menu

Le Sahel ou la gestation d’un enfer sans frontières.

Mardi 20 Août 2024

Le contexte sahélien en 2024 suit une trajectoire de dégradation certaine, en raison de maintes dynamiques où dominent la récurrence des causes, l’interdépendance des dissentiments et la complexité des contradictions. Le dernier semestre de 2024 couve la perspective crédible d’une brutalité totale, de chacun contre tous, en toute réciprocité:




1. Intensification des violences
L’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS), le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM, franchise unifiée d’Al-Qaïda), et Boko Haram, continueront d’étendre leur emprise en direction des espaces de la ruralité. Ils accentueront le blocus des villes moyennes et y introduiront davantage de chevaux de Troie. Depuis le début de l’année, les deux obédiences djihadistes en concurrence ne cessent de renforcer leurs capacités de recrutement. A mesure que les défaites des Forces de défense et de sécurité (FDS) et les bavures imputables aux soldats, entités d’autodéfense et mercenaires étrangers déprécient le moral des armées, s’exacerbe la défiance d’une partie de la population à l’endroit de ses protecteurs.

 Les attaques frontales, attentats-suicide et autres embuscades vont se multiplier, notamment à l’intérieur des zones frontalières (Liptako-Gourma) d’où la vulgarisation du recours, par les terroristes et les rebelles, aux Engins Explosifs improvisés (EEI). Sans avoir établi jusqu’ici une connexion avérée aux partisans du Califat, l’essor de mouvements d’insurrection non religieux aggrave l’encerclement des FDS. Des raids très ciblés que recèle la connaissance et la maitrise du relief illustrent l’avantage comparé, au profit des combattants autochtones. L’usage des mines antipersonnel sur les routes et les pistes de circulation motorisées augmentera à proportion du resserrement de l’étau autour des casernes, cantonnements ponctuels et le long des corridors d’approvisionnement.

2. Enlisement des pouvoirs de prétoriens
Les autorités respectives de la Confédération des Etats du Sahel (CES-ex AES), fragilisés après des décennies de fraude électorale, de corruption et de modicité des moyens, feront face, de jour en jour, au défi exponentiel de préservation de leurs territoires. L’échec des juntes et la discorde interne qui en découle risquent de détourner l'attention de la lutte antiterrorisme. Il s’ensuivra une baisse plus drastique de la capacité de ces régimes d’exception à obtenir, de l’éxtérieur un soutien efficace, dans le cadre de la légalité. Les ressources extractives (mines d’or, pétrole) constitueront, d’ici 2025, l’unique monnaie d’échange pour l’acquisition de matériel létal, en provenance de Chine, de Turquie et de Russie. L’économie de guerre s’installe, sur fond de récession, d’activités informelles et de banalisation des trafics comme entreprise de subsistance, donc de survie collective.

3. Réduction de la présence internationale conventionnelle .
Le retrait de l’appui de l’Union européenne, des Etats Unis d’Amérique et le désengagement des casques bleus de l’Onu, crée un vide dorénavant impossible à combler par la seule conjonction des FDS et des miliciens Russes (Africa Corps ex Wagner) ou Turcs (société de sécurité Sadat). En dépit de la hausse constante des achats d’équipement offensif, surtout des drones de surveillance et de tirs, les unités d’élite de la confédération des états du Sahel (CES) ne parviennent pas à rentabiliser leur supériorité dans les airs.

Malgré l’efficience des vecteurs aériens au cœur de nombreux champs de bataille (Ukraine, Ethiopie, Moyen Orient), celle-ci fait encore défaut devant l’avancée et l’audace des katibas djihadistes, plus virulentes que jamais. EIGS, GSIM et rébellions profanes poursuivront l’effort de fabriquer des drones et des roquettes de fortune en vue de diminuer leur dépendance aux butins arrachés à l’ennemi, dont la quantité et la qualité ont atteint un summum de saisies, de juillet à août 2024.

4. Haines intercommunautaires.
Les tensions sociales iront crescendo, selon le degré de pénurie alimentaire, elle-même tributaire de la géographie des champs en friche, de la désertification, du stress hydrique et de la raréfaction globale des ressources de la nature. La montée des milices d'autodéfense favorisera l’extension des actes de barbarie à l’encontre des civils et parmi ceux-ci, sur la base de l’ethnicité, des divergences de doctrine et de la surenchère entre fondamentalistes sunnites concernant la conduite des combats et l’application de la Charia.

5. Gouvernance de précarité multidimensionnelle.
Le Sahel subit et subira fortement une succession d’urgences de masse, à laquelle participent les aléas du désordre climatique. Des millions de personnes en quête de sûreté seront déplacées vers les villes, précisément à leur périphérie, sans exclure qu’un tel exode n’entraîne un surcroit de guérilla urbaine, à cause des infiltrations d’éléments provocateurs. L’accès aux victimes et leur prise en charge s’en trouveront compliqués. Un début de famine et l’effondrement des systèmes de santé moderne, après la faillite de l’école, n’est plus de l’ordre de l’hypothèse, au sein de la CES.

L’instabilité du Soudan et l’incertitude quant à l’avenir du Tchad étendraient le continuum de la crise, du littoral du Golfe de Guinée aux rivages africains de la mer Rouge. Il est assez peu probable que la CEDEAO, l’Union Africaine ou les Nations unies prennent une initiative substantielle de nature à enrayer l’élan de l’entropie généralisée. La CES s’enfonce dans l’isolement diplomatique et le tout militaire. En revanche, la Russie, la Chine et la Turquie rehaussent leurs niveaux d’implication martiale, au travers d’accords léonins avec les gouvernements du moment. Toutefois, leurs interventions accroissent les tensions géopolitiques et compliquent la résolution du conflit. Le rôle des puissances alternatives à l’Occident devient un argument-clé de la complication et le principal carburant de la destruction parce qu’il confère, à l’offre djihadiste, l’opportunité de mieux incarner le salut au nom de Dieu.

6. Lendemains de ruine et politique de l’autruche.
La situation au Sahel en 2024 devrait se détériorer. Le bourgeonnement métastasique des affrontements, de la vulnérabilité des gouvernements, des violations de la dignité des individus et du désengagement de la communauté internationale relève, maintenant, de la fatalité. Les djihadistes et leurs alliés objectifs des diverses rébellions (Mali, Niger) régentent, de facto, des aires en expansion irrépressible. Peu importent les changements de meneur au sommet, qui résulteraient d’un consensus de fin de transition ou d’un putsch dans le putsch - la Confédération des Etats du Sahel évolue vers un embryon de théocratie, à l’image des Talibans.

 Plus aucun facteur structurel de stabilité ne s’y oppose, pas même une improbable coalition internationale. La contagion en cours touche, suivant une intensité croissante, le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Au-delà, la dissémination de la menace n’est qu’une question de temps. Personne, aujourd’hui, n’imagine l’ampleur de tels flux migratoires ni leur impact sur les équilibres de l’Afrique de l’Ouest, voire de l’ensemble du Continent.

Sous peine de négligence mortelle, la réalité enjoint, au monde, de se préparer à l’éclosion du futur Sahélistan, probablement dès 2025. Malheureusement, le niveau de conscience humaine devant l’évidence et l’imminence du péril, paraît bien en deçà du minimum d’anticipation requis.

Docteur Ousman Dicko


Nouveau commentaire :






La FFRIM nomme M. Aritz López Garai à la tête de la sélection nationale “A” de Mauritanie (Communiqué)

17/01/2025

Litige financier avec le PSG : Mbappé passe à la vitesse supérieure

21/08/2024

Angleterre: Phil Foden élu "Joueur de l'année" par ses pairs

21/08/2024

À l’origine d’une campagne chauvine…

11/06/2024

Mondial 2030 : La finale se jouera au Maroc ou en Espagne

20/03/2024

RD Congo/Mauritanie: 2-0

16/11/2023

Ballon d'Or 2023 : Et de huit pour Lionel Messi

31/10/2023

Ballon d'Or : Emiliano Martinez remporte le Trophée Yachine 2023 du meilleur gardien

31/10/2023

Ballon d'Or 2023 : Jude Bellingham remporte le Trophée Kopa

31/10/2023

Ballon d’Or : Vinicius remporte le trophée Socrates

31/10/2023

Flux RSS



Inscription à la newsletter

Mauritanie/FMI : accord pour un décaissement de 28 millions de dollars

Le gouvernement mauritanien et les services du Fonds Monétaire International(FMI), sont parvenus à un accord ad référendum, sur la quatrième revue du programme économique, appuyé par le Mécanisme Elargi de Crédit (MEDC), la Facilité Elargie de Crédit (FEC) et un accord sur la Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD), au terme d’une mission conduite par Félix Fischer, qui s’est déroulée du 28 avril au 09 mai, annonce un communiqué.

 Ainsi, les autorités mauritaniennes et le FMI conviennent    d’un accord ad référendum « sur les politiques à mettre en œuvre, pour conclure la quatrième revue au titre de l’accord sur le Mécanisme Elargi de Crédit (MEDC) d’une durée de 42 mois,  la Facilité Elargie de Crédit (FEC) et la troisième revue au titre de la Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD).
 Sous réserve de l’approbation du Conseil d’Administration du FMI, la Mauritanie recevra un décaissement de 6,4 millions de Droits de Tirage Spéciaux (DTS, environ 8,6 millions de dollars) au titre des accords MEDC/FEC et 14,86 millions de DTS (20,1millions de dollars) au titre de l’accord FRD, portant le montant total des décaissements de la MEDC/FEC et de FRD à 111 millions de DTS, soit 148,4 millions de dollars ».
Abordant la situation des principaux indicateurs de l’économie, ce document signale que « l’activité économique a été plus forte que prévue, avec un taux de croissance de 5,2% en 2024, supérieur à la projection initiale de 4,6%.
La croissance devrait ralentir en 2025 à 4%, sous l’effet de la contraction du secteur extractif. Les perspectives à moyen terme restent globalement positives.
Pour autant que des réformes additionnelles soient mises en œuvre pour diversifier l’économie et stimuler le secteur extractif ».
Appréciant  le comportement de l’économie par rapport aux objectifs du programme avec le FMI, le document note « des performances sur la bonne voie  dans l’ensemble : tous les objectifs quantitatifs pour fin décembre 2024, ont été atteints. L’ajustement budgétaire a été en ligne avec les objectifs du programme, grâce à une augmentation des recettes fiscales et une maîtrise des dépenses. L’engagement des autorités pour une politique budgétaire et pour la flexibilité du taux de change, contribue à préserver la stabilité macroéconomique et à renforcer la résilience aux chocs dans un contexte d’incertitude mondiale exacerbée ».
Dans le même temps « le gouvernement s’est engagé à maintenir le déficit non extractif à 15,4 milliards de MRU (soit 3,4% du PIB) en 2025.
 Une meilleure mobilisation des recettes intérieures   et une efficacité accrue des dépenses permettront de créer l’espace budgétaire pour répondre aux besoins importants de développement de la Mauritanie ».
Le FMI salue par ailleurs « les progrès en matière de réformes  structurelles, notamment la promulgation de la loi sur la banque centrale et le secteur bancaire, le nouveau code des investissements,  encourage le parachèvement et l’application des  décrets sur les entreprises publiques, le Code des Investissements et la Zone Franche de Nouadhibou (ZFN) ».
 

Amadou Seck Seck
11/05/2025