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Réaction à la condamnation de l’ancien président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz : une justice instrumentalisée au service d’un système en crise ? Par Cheikh Sidati Hamadi Expert Senior en Droits des CDWD, Essayiste, Chercheur Associé

Vendredi 16 Mai 2025

Dans toute démocratie véritable, la justice est bien plus qu’un simple instrument de régulation : elle en constitue le socle. Elle garantit l’égalité de tous devant la loi, assure la séparation des pouvoirs et protège les citoyens contre les abus. Lorsqu’elle est indépendante et équitable, elle renforce la confiance dans les institutions. Mais lorsqu’elle devient un outil au service d’intérêts politiques, elle sape les fondements mêmes de l’État de droit.



En Mauritanie, la condamnation en appel de l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz à 15 ans de prison pour enrichissement illicite soulève des interrogations majeures. Loin d’apaiser l’opinion, ce verdict alimente les soupçons d’une instrumentalisation politique de la justice. Ce procès ne semble pas clore un chapitre de reddition de comptes, mais plutôt ouvrir une nouvelle phase d’un règlement de comptes entre anciens compagnons de plus de quarante ans. Il met à nu une crise de confiance larvée au sein d’un système de gouvernance qui semble atteindre ses limites.

Une sentence lourde, un contexte politique trouble

Arrivé au pouvoir en 2008 par un coup d’État avec l’appui de figures aujourd’hui centrales dans le régime actuel, Mohamed Ould Abdel Aziz est désormais désigné comme l’incarnation de la corruption. Pourtant, le durcissement spectaculaire de sa peine triplée en appel sans nouvelles preuves déterminantes selon plusieurs observateurs, laisse planer le doute sur la neutralité de la procédure. Beaucoup y voient moins la volonté de rendre justice que celle de solder un conflit interne au sommet de l’État.

Le paradoxe est saisissant : ceux qui hier partageaient les leviers du pouvoir et bénéficiaient de ses privilèges se retrouvent aujourd’hui dans une confrontation judiciaire où la justice semble trancher moins sur les faits que sur l’opportunité politique. Cette mise en accusation ciblée donne à penser que la justice est utilisée pour redessiner le paysage du pouvoir au gré des rapports de force internes, bien plus qu’elle ne vise une réelle reddition de comptes.

Un système qui se cherche en sacrifiant l’un des siens

Cette affaire s’inscrit dans un contexte où le régime tente de se renouveler tout en recyclant les mêmes figures qui en furent les artisans. En condamnant un ancien président tout en appelant d’anciens collaborateurs à renforcer le système actuel, le pouvoir en place envoie un message ambivalent. Il semble vouloir tourner une page sans vraiment en écrire une nouvelle.

Cette contradiction illustre l’incapacité d’un système à se réformer sincèrement. Elle trahit une stratégie de légitimation par l’exclusion d’un symbole devenu encombrant, sans engager une véritable rupture avec les pratiques du passé. Cela nourrit un profond scepticisme dans une population en quête de justice sociale, d’équité et de vérité.

Une justice sélective, symptôme d’une crise plus profonde

L’affaire Ould Abdel Aziz met en évidence une justice à deux vitesses. Alors que certains responsables présumés de corruption demeurent intouchables, d’autres sont ciblés avec une rigueur qui semble proportionnelle à leur isolement politique. Une telle asymétrie entame la crédibilité des institutions et mine la confiance citoyenne.

Dans ce climat de sélectivité judiciaire, la promesse de transparence et de bonne gouvernance sonne creux. La lutte contre la corruption ne saurait être crédible si elle ne s’applique qu’à des adversaires affaiblis. Elle doit être globale, impartiale et fondée sur le droit, et non sur des considérations conjoncturelles.

Conclusion prospective

Au-delà du sort personnel de Mohamed Ould Abdel Aziz, c’est le rapport entre pouvoir, justice et démocratie qui est en jeu. L’avenir politique de la Mauritanie dépend de sa capacité à bâtir un État de droit solide, où la justice ne serait plus l’instrument des luttes de pouvoir, mais le garant impartial de l’équité et de la vérité.

Il est urgent d’engager une refondation institutionnelle ambitieuse, fondée sur l’indépendance de la justice, la reddition de comptes sans distinction, et la participation citoyenne. Si cette opportunité n’est pas saisie, la Mauritanie risque de s’enfoncer dans une spirale de défiance où les anciens schémas continueront de se reproduire sous des formes nouvelles.







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Investi président de la BAD : défis et enjeux pour Sidi ould Tah

Elu président de la Banque Africaine de Développement (BAD), au troisième tour de scrutin, avec 76,18% des voix fin mai, l’économiste mauritanien, Sidi ould Tah, a été investi dans ses nouvelles fonctions ce lundi 01 septembre, au cours d’une cérémonie solennelle organisée dans le plus grand réceptif hôtelier de la capitale économique ivoirienne.

Un événement qui s’est déroulé en présence de plusieurs chefs d’états africains parmi lesquels Mohamed Cheikh El Ghazouani , tout le gotha de la finance, des affaires du continent et du monde.
Aussitôt investi, le nouveau patron de la BAD a proclamé sa détermination à agir en faveur « de la construction d’une Afrique robuste et prospère » malgré un contexte marqué par de nombreux défis, qui indiquent clairement les enjeux aux quels doit faire face la Banque Africaine de Développement (BAD) au cours des 5 prochaines années.
Le nouveau président de l’institution financière panafricaine « prend l’engagement de travailler dans un esprit de concertation et de collégialité, afin de poursuivre la mission qui nous unit : bâtir une Afrique robuste et prospère ».
 

Défection américaine et poids de la dette

Sur le » front »  depuis plusieurs années, entre responsabilités gouvernementales et direction de la Banque Arabe pour le Développement Economique  de l’Afrique (BADEA), le nouveau super banquier africain,  est parfaitement conscient des défis et enjeux « réduction de l’aide internationale au développement, poids de la dette et impact négatif du changement climatique ».
En effet, Sidi ould Tah prend les commandes BAD, dans un contexte compliqué  de retrait des ressources américaines du Fonds Africain de Développement (FAD), le guichet concessionnel de l’institution financière panafricaine.
 Un gap de 427 millions de dollars, qui renvoie au redoutable défi des financements alternatifs.
Un enjeu capital restitué à travers ce passage du discours du nouveau président de la BAD « l’Afrique nous regarde, la jeunesse nous attend, le temps est à l’action».
Ainsi,  au cours de ce mandat de 5 ans, la BAD doit faire face au problème de la recapitalisation, sous la poussée vertigineuse des demandes de financements, dans un contexte de baisse de l’aide publique.
La question vitale de la transformation de l’institution, pour plus d’efficacité et une adaptation aux besoins  des pays africains.
Le financement du développement à travers une plus grande mobilisation des ressources. Un défi qui établit une jonction parfaite avec la nécessité de recapitalisation.
Plus d’indépendance stratégique et soutien au secteur privé, véritable moteur de la croissance et de l’emploi, figurent également au rang des défis de la nouvelle administration de la Banque Africaine de Développement(BAD).
Sidi ould Tah est un économiste  mauritanien, natif de la région du Trarza (Sud/Ouest), âgé de 61 ans. Formé à l’université de Nouakchott et en France, il a été ministre de l’économie et Directeur Général de la Banque Arabe pour le Développement Economique  de l’Afrique (BADEA), pendant une décennie.
Fondée en 1964, la BAD, l’une des grandes banques multilatérales de développement,  compte 81 pays membres, dont 54 africains.
Le capital de l’institution est passé de 93 à 318 milliards de dollars sous la présidence du Nigérian AkiwumiAdesina, avec une notation  AAA.
Les ressources de la BAD, qui finance de nombreuses infrastructures sur le continent,  proviennent des  états membres, des emprunts effectués  sur les marchés internationaux, des remboursements et revenus des prêts.
 

Amadou Seck Seck
01/09/2025